Depuis son premier album, Mitsu, l’auteur et illustratrice Mélanie Rutten surprend toujours. Avec L’Ombre de chacun elle se surpasse et nous emmène encore plus loin dans son univers poétique peuplé d’animaux bienveillants. Focus sur cet album en lice pour les Pépites de l’Album, au Salon du livre Montreuil.
Un jour, un petit lapin est arrivé. Il y avait un peu de vent. Et une ombre peut-être.
Les petits arrivent parfois comme ça. Comme le vent.
Parfois comme une tempête.
J’aimerais qu’on puisse offrir à chaque enfant cet album empreint d’une immense tendresse, d’une grande poésie autant que d’une vraie gravité. Le sujet ? La peur autant que le désir de grandir.
L’univers de Mélanie Rutten est peuplé d’animaux qui ressemblent à des humains : un cerf inquiet comme une maman, un petit lapin qui veut grandir mais qui n’ose pas tout à fait, un soldat en guerre, espiègle comme une fillette prête à tout pour gagner sa liberté, un chat qui fait toujours le même rêve, un livre curieux de tout et une ombre, symbole de nos peurs.
C’est l’histoire d’un petit lapin qui trouve un cerf pour l’aider à devenir grand, se faisant ils veillent l’un sur l’autre, jusqu’au jour où il faut bien se séparer. C’est l’histoire d’un soldat en colère contre tout, mais qui veut bien protéger un lapin seul et fragile.
On n’aura qu’à être seuls. Mais ensemble ce sera plus simple.
Une histoire comme une balade, un livre chorale, une danse où les personnages – le lapin, le cerf, le soldat, le chat, l’ombre muette et le livre – s’apprivoisent, accordent leur confiance et affrontent ensemble leurs inquiétudes, leur solitude, l’aventure…
Les histoires, ça sert à avoir moins peur.
A l’abri des grandes forêts emplies de lumière, là où se passent toujours les histoires, les routes se croisent et les questionnements aussi. Les amis vont apprendre à rencontrer l’autre, pour grandir un peu.
Est-ce qu’on sait tout quand on est grand ? demande le soldat.
On en apprend tous les jours, dit le Livre.
C’est le cinquième album de la Belge Mélanie Rutten aux éditions Memo et elle se surpasse ici. A la fois par la construction de la narration et par ses illustrations à l’encre d’une infinie tendresse. Les couleurs se mélangent conférant une tonalité parfois mélancolique parfois empreinte d’une gaieté explosive, comme dans l’épisode du volcan. Un doux mélange comme celui des personnages dont les destins se fondent dans un tourbillon de couleur comme la ronde de la vie.
Est-ce son enfance passée en Afrique qui donne à l’artiste le goût des couleurs chaudes ? Sa palette graphique est d’une luminosité et d’une intensité absolue, alternant les bleus nuit d’encre et les rose, rouge et jaune qui frétillent. Ses images sont comme de grands miroirs qui reflètent nos âmes d’enfants. Jamais moralisateur ni gnangnan, chaque mot est sobre, juste et profond. On sent à la lire, une grande douceur et un amour de l’autre. Que donner de plus à un enfant ? L’ombre de chacun brille comme une pépite précieuse et réchauffe nos cœurs. A lire et à relire inlassablement.
Mélanie Rutten, éditions Memo, 56 pages, 17 €
dès 5 ans
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