Les illustrations audacieuses et délicieuses de Marije Tolman font de Petit Renard, l’un des plus jolis albums de l’automne à glisser sous le sapin. L’ouvrage salué par la critique est signée du poète néerlandais Edward van de Vendel.
« Petit Renard poursuit deux papillons. Pourquoi ?
Parce qu’ils sont violets.
Mais voilà qu’il n’y a plus de sable sous ses pattes : seulement de l’air !
Petit Renard tombe, tombe…
La dune se rapproche… et quand il atterrit, ça fait : POUF !
Et là, c’est là que commence son rêve.
Un rêve comme Petit Renard n’en a jamais fait. »
C’est avant tout une aventure visuelle et sensuelle.
Une balade d’un renardeau orange fluo, tout feu follet, dans les dunes bleutées. Une boule de poils rousse au museau de neige qui hume l’air des matins vifs et folâtre dans les dunes après canards, goélands, aigrettes et autres oiseaux des bords de la mer du Nord.
Ca sent bon le grand air, ça sent le bonheur aussi quand, bras en croix et museau curieux pointé au ciel, il accueille, aux côtés du cormoran, la fraîche caresse du vent.
Mais notre renardeau tout fou perd connaissance à la faveur d’une chute du haut d’une dune un peu trop haute pour son jeune âge… patatras le voilà endormi.
Dans son sommeil, il rêve de sa toute petite enfance : renaissent les câlins bien au chaud avec Maman Renard, les bagarres entremêlées avec ses frères et sœurs, la sortie du terrier et son premier émerveillement, une lune toute ronde et blanche comme un trou éblouissant dans le ciel.
Défile son jeune passé, avec chaque découverte : les premières odeurs, les fleurs, la chasse aux petits animaux, le goût sensuel de l’eau fraîche, l’amitié avec le daim, le croquant des campagnols sous les crocs, la rigolade avec le gros ballon rouge oublié à la plage, la peur lorsqu’il se retrouve le museau coincé dans un bocal…
Et lorsqu’un petit garçon, aussi rouquin que lui, pédale pour faire la course avec les oies sauvages, il tombe sur la petite boule rousse évanouie. C’est la rencontre inévitable, sur cette plage oubliée, ce lieu secret, là où commencent tous les jeux…
La grande originalité de cet album tient dans sa composition graphique exceptionnelle, un traitement monochrome bleu-vert des paysages, par-dessus lesquels les animaux dessinés semblent évoluer comme s’ils prenaient possession d’un immense terrain de jeux, intemporel. On se croirait aux débuts d’un film animé, comme si le paysage était là, immuable, et les personnages avec leur vie propre, déboulaient avec fracas dans l’image sage, s’enfuyant à tire-pattes devant les biches.
On est muet d’admiration devant cette histoire qui se laissera regarder presque sans mot dire avec les tout petits, saisis par la force des images qui semblent s’animer sous nos yeux. On peut presque sentir la douceur de l’herbe, la fraîcheur du vent qui rebrousse les poils et le soyeux des pelages.
Et pour les plus grands, le texte subtil d’Edward van de Vendel dont j’avais tant aimé Le chien que Nino n’avait pas est comme une balade intérieure, une invitation à murmurer de doux souvenirs pour nous bercer davantage.
Les différentes techniques, photos monochromes pour le présent et crayons et pastels pour les souvenirs confèrent une grande poésie à cette rêverie infinie. Et le lecteur de se surprendre à vouloir pénétrer telle Mary Popins dans l’image. Ne passez pas à côté de cet album, plongez dans cet éloge de la vie et de la liberté pour gambader en sifflotant, nez au vent, aux côtés de cette faune enchantée.
Petit Renard
Edward van de Vendel, ill. Marije Tolman, traduit du néerlandais par Emmanuèle Sandron
88 p., Albin Michel Jeunesse, 15,90 €
(dès 3 ans)
Laisser un commentaire