C’est le livre qui tombe à pic ! Fatale Spirale de Fabrice Vigne et Jean-Baptiste Bourgois est le livre à offrir à tous, petits et grands, pour reconstruire civilité, solidarité et faculté de vivre unis ensemble contre la barbarie et la bêtise. Pourquoi ? Son message de bonne humeur est terriblement contagieux.
« Nous en sommes-là.
Il est facile, après la catastrophe, de hocher la tête, pincer les lèvres, et murmurer lentement d’un air entendu : « Cela devait arriver ». En réalité, personne ne sait ce qui doit arriver. Personne ne peut le voir. Sauf, bien sûr, une fois que tout est arrivé. On ne prévoit que le passé. »
En relisant ces quelques lignes, retranscrites hier avant le terriblement événement survenu à Charlie Hebo, elles résonnent tragiquement, comme une alerte que l’on aurait ignorée. Raison de plus pour se précipiter sur ce petit trésor à transmettre autour de nous.
A l’heure où le pessimisme fait rage, où les scénarios les plus catastrophistes deviennent réalités, ce petit livre pose une pierre nécessaire pour inverser la courbe de la mauvaise humeur, de la décrépitude et de la paresse sociale : Fatale Spirale. Fatale ? Oui mais pour notre plus grand bonheur.
Tout commence un matin dans le hall d’un immeuble de la Cité des Oliviers III, en grande banlieue. Une cité parmi d’autres où « à force de juxtaposer les vies difficiles des populations qui cohabitent (…) les rapports humains y présentent fréquemment une tension dangereuse, et, par moments, inflammables ».
C’est donc dans ce hall, ce matin fatal à 7h21mn, exactement que la mèche a été allumée. Khader O., 21 ans, se précipitait avec son pitbull dans l’ascenseur au moment où Bertrand P., 46 ans, la mine morose, s’en extirpait. Manquant de se percuter, les deux mâles se toisent, le souffle court à 3 millimètres l’un de l’autre. A cet instant précis – l’origine du mal a pu être reconstituée grâce à la vidéo surveillance de l’immeuble – les deux hommes, les yeux dans les yeux… ont souri. Oh, un sourire très léger. Mais trop tard, le mal était fait.
Aussitôt arrivé dans le tramway, Bertrand P. sourit à tous les voyageurs à renfort de grands « bonjour ! », « signe d’un dérèglement mental », tandis que le jeune Khader O., de retour dans l’appartement propose à sa vieille mère de faire la vaisselle, passer la serpillère et faire ses courses. Madame O., effarée par un tel traitement et désœuvrée se mit à confectionner des pâtisseries pour tout l’étage… Vous l’avez compris le ver était dans le fruit.
Quant aux dégâts occasionnés dans le tramway, à force de sourires et de politesses pendant neuf longues stations, ils s’étaient largement contaminés et se répandaient un peu partout. Bref l’effet papillon était en marche, entraînant sourires, câlins dans les embouteillages, bonnes actions de toutes parts, « civilités et douceurs urbaines » sur les réseaux sociaux et même tags intempestifs recouvrant les murs tels les incompréhensibles « offrent des fleurs à la police ! » ou « offre des fleurs à ta maman !». Un vrai carnage d’ampleur national aussitôt récupéré par les politiques.
Avec le ton volontairement clinique de l’enquête et du reportage, Fabrice Vigne nous emmène sur le terrain salutaire de la prise de conscience de notre responsabilité face au manque de courtoisie civile. Il pointe avec malice l’absurdité de nos comportements, notre mauvaise foi quotidienne, le non sense de la mauvaise humeur et la facilité avec laquelle les choses pourraient se passer autrement pour le meilleur de notre vie collective. C’est drôle, bien vu, finement dépeint et donne furieusement envie d’être contaminé. Et au regard de l’actualité, incite à l’application immédiate.
Un petit sourire pour contribuer au réchauffement climatique des civilités. C’est pour la bonne cause, lisons, retrouvons le sourire !
Allez, je vous embrasse, tiens.
Fatale Spirale
Fabrice Vigne, ill. Jean-Baptiste Bourgois
Sarbacane, 70 p., 14,50 €
Le Lapin Blanc dit
Merci pour cette belle découverte !