Le best-seller de la littérature brésilienne, Mon bel oranger de José Mauro de Vasconcelos, vient d’être adapté au cinéma par Marcos Bernstein, scénariste de Central do Brasil. Une occasion de découvrir l’œuvre ? Oui, à condition de choisir d’abord le roman.
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Que pena ! Je me réjouissais de l’adaptation au cinéma de Mon bel oranger, le classique de la littérature de jeunesse brésilienne, datant de 1968. Traduit dans une douzaine de langues, ce roman en grande partie autobiographique connut un succès mondial, désormais inscrit dans les programmes de collège. Mais le film au pathos écrasant, malgré la prestation des deux acteurs principaux, n’arrive pas à la hauteur de l’œuvre : succession de tableaux d’une enfance misérable mis bout à bout, personnages qui ont parfois du mal à exister, plans trop léchés qui étouffent le jeu (trop larmoyant) de l’enfant… Le garçon perd en spontanéité alors que toute la beauté du personnage tient dans sa capacité d’émerveillement, son imagination et ses ressources poétiques… Découvrir ce classique par le film, serait passer à côté du livre.
Zézé est un petit garçon précoce. A cinq ans, il sait déjà lire. Plus tard, c’est sûr, il sera savant ou poète. Ultra-sensible, intelligent et vif, il est maltraité par parents et camarades de jeux qui voient en chacune de ses inventions, l’intervention du diable. Pourtant Zézé est un garçon généreux et doué pour le bonheur. Il aime s’occuper de son petit frère Luis « qui a un prénom de roi », l’emmène jouer dans un jardin zoologique imaginaire – en fait, un poulailler – transformant de sa verve les poules en panthères noires, et les coqs en lion ou tigre du Bengale. Zézé est ami avec un chanteur de rue, qu’il assiste car il aime chanter, adore son vieil oncle Edmundo qui prend le temps de l’écouter. Et surtout, il a un ami secret : un pied d’oranges douces qui lui parle et devient son confident. A califourchon sur l’une de ses branches, Zézé galope tel un cow-boy intrépide, loin dans sa tête. Sa famille ne comprend pas les trésors d’imagination qui jaillissent de ce petit cerveau – autant que les bêtises – comme tout enfant trop livré à lui-même. Car au fond, Zézé possède un cœur d’or, il cire des chaussures pour offrir un cadeau de Noël à son père, pourtant prompt à le rosser. A six ans, Zézé sait que la vie est dure mais qu’elle peut valoir le coup lorsque l’on rencontre un véritable ami. Portugâ, qui possède la plus belle voiture du coin, le deviendra, et c’est avec lui que Zézé apprendra « le sens de la tendresse ». Partageant parties de pêches, discussions sur la vie et petits moments volés, le vieil homme prendra soin de l’enfant délaissé. Et c’est là, d’ailleurs les plus belles scènes du film, entre Joao Guilherme Avila (Zézé) et José de Abreu (magnifique Portugâ), où leurs échanges d’une simplicité universelle confèrent au film son aspect solaire.
Ce livre est à découvrir car la voix de Zézé est de celles qui touchent pour longtemps. D’un registre littéraire qui aurait pu être surchargé en pathos, ce texte d’une profonde finesse, imprime sa petite musique intérieure, un chant fragile mais joyeux, comme celui de l’oiseau qui chante à l’intérieur de Zézé. Tudo bom.
Mon bel oranger
José Mauro de Vasconcelos, traduit du brésilien par Alice Raillard
256 pages, 5,90 €
Le livre de poche
Dès 11 ans
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