Shel Silverstein campe un lion déroutant, dévoreur de chasseurs, grand amateur de marshmallows et tireur d’élite. Avant de vous plonger dans les livres de la rentrée, il serait dommage de passer à côté de cette pépite de la littérature classique américaine.
Un lion qui devient champion de tir, ça n’existe pas ? Un lion qui joue dans les ascenseurs, ça n’existe pas ? Un lion élégant jusqu’au bout des griffes qui se fait bichonner chez le coiffeur et la manucure, ça n’existe pas, ça n’existe pas ? Et pourquoi pas ? dirait Robert Desnos.
L’auteur illustrateur Shel Silverstein confirme que ce lion existe, la preuve il l’a inventé ! Se mettant lui-même en scène sous le nom d’Oncle Shelby, l’Américain conte la vie du lion le plus farfelu qui soit. Imaginez un lion d’Afrique au sens de la répartie improbable, qui se prend à dévorer un chasseur car la nature revient toujours au galop même si on est un fauve peu farouche et qu’on a le sens de la conversation très développé…
Armé de son « grand bâton de fer », le lion s’entraîne au tir, dévorant les chasseurs qui lui tombent sous la patte, à mesure que les cartouches viennent à manquer, se propulsant ainsi roi de la gâchette…
Mais ce lion n’a qu’un rêve (hormis confectionner des carpettes en peau de chasseur) : dévorer des montagnes de marshmallows ! Alors, le jour où un directeur de cirque lui promet toutes les friandises du monde en échange de son talent, son destin bascule et la bête part avec le baratineur à la ville. S’en suit un épisode loufoque d’apprentissage de la civilisation, qui n’est pas sans rappeler celui d’un jeune Babar…
Ici, notre fauve s’amuse comme un petit fou dans les ascenseurs de l’hôtel, essaie des costumes fort élégants jusqu’à exiger un complet entièrement confectionné de marshmallows, dîne dans les restaurants les plus sélect… Pour se faire obéir, un seul GRAOUGRRRRRRRRR met tout le monde aux ordres.
Evidemment, sous le chapiteau, le public se presse pour assister au spectacle du lion qui ne manque jamais sa cible. Et voici Lafcadio (son nom de scène), qui peu à peu fait sa star avec ses beaux costards, sa montre à gousset, ses clubs de golfs, ses soirées VIP et ses grands moments de lassitude… un lion terriblement humain, en quelque sorte…
(Les lions font souvent office de ressorts comiques à contre-emploi dans les albums, vous vous souvenez des Lions qui ne mangent pas de croquettes ?)
Shel Silverstein n’a pas connu le XXIe siècle (il est décédé en 1999) et fut un artiste multicartes : conteur hors pair, mais aussi poète, musicien et compositeur – entre autres pour Johnny Cash et Jerry Lee Lewis – il crée ici un personnage intemporel, d’une infinie liberté, tant dans le trait que dans l’intention. Avec cette fable satirique qui n’a pas pris une ride (l’album date de 1963), le poète nous interroge avec humour sur des questions philosophiques essentielles : la nature de l’être, la différence entre nature humaine et animale, le bonheur et le sens de la vie. A dévorer évidemment. Et plus vite que ça GRAOUGRRRRR !!!!
voir un extrait en vo
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Lafcadio, le lion qui visait juste
Shel Silverstein, traduit de l’anglais (USA) par Valérie Le Plouhinec
114 pages, 13 €
Les grandes personnes
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